La masturbation

Sujet tabou s’il en est ..Osons l’aborder ensemble.

Un peu d’histoire.

Si JJ ROUSSEAU a ouvert la voie avec son  « EMILE » ,son livre a bien été brûlé en place publique en 1762. En 1758 le docteur Samuel TISSOT grand pourfendeur de la masturbation, sorte de Zorro des mœurs arrive sur son cheval avec son livre : « Essai sur les maladies produites par la masturbation ». C’est avec cette parution le début d’une gigantesque répression sexuelle en Europe. Tissot s’emploie à décrire avec délectation les maladies abominables et les pires tourments qui les accompagnent pour ceux qui s’adonnent à la masturbation. L’apocalypse est en marche pour ceux là et pour les autres, qui en ont peur. Le corps médical lui emboîte le pas et joue la même musique.La morale des religions, catholique, protestante, suivent dans le même sillon. Tout le monde s’y met.
A noter que le crime premier est celui de la masturbation masculine : la déperdition du sperme à cette occasion fait apparaître le spectre de la fin du monde et menace la reproduction. C’en est trop.

Haro sur le Clitoris

Le clitoris menacerait l’homme par sa dimension : supérieure au pénis !!! Et puis, très clairement la masturbation féminine signe l’indépendance féminine dans la jouissance et l’orgasme qu’elles peuvent trouver en dehors des hommes. Cela ne plaît pas du tout.
Et la vengeance s’abat assez rapidement avec un arsenal de matériel ad hoc : instruments de torture allant de la culotte en ferraille avec clef, slip à clous pour les hommes, gants de nuit, vêtements de contention, la liste est longue. Aussi : l’exérèse, l’excision, la castration, etc, car il faut vaincre ce plaisir solitaire à tout prix.
L’horreur est sans limites. Cette persécution majuscule eut lieu au dix huitième et au dix-neuvième siècles.
Heureusement, poètes, écrivains, peintres ne se privèrent pas dans leur art de célébrer ce plaisir solitaire, comme une aventure érotique, bienvenue excitante et décrite quelquefois de façon feutrée, déguisée. Sapho, Pierre Louÿs, Shere Hite et bien d’autres. Comme Diderot parlant de la masturbation comme une « chose douce » et lui donnant ainsi tout son sens.
Freud optera pour l’interprétation d’une sexualité immature envers les femmes clitoridiennes et jouissant par l’excitation de cet organe. Pour lui ,le rapport sexuel avec pénétration lui est supérieur dans le développement de la sexualité de la femme.

En 1940 le rapport Kinsey vient rétablir quelques vérités et réhabilitant la pratique masturbatoire amène un souffle d’air. Celle-ci est garant d’une sexualité épanouie.

1966 : Masters et Johnson font paraître au grand jour le résultat de leur étude très précise et très complète sur le comportement sexuel humain. Ce tournant est une révolution concernant les découvertes du fonctionnement de la sexualité et bouscule les tabous. C’est une avancée considérable pour les progrès de l’humanité qui va poser les bases de la mise en place de la sexologie.

L’OMS a depuis établi une définition de la santé sexuelle qui n’est pas l’absence de troubles mais un bien être caractérisé et idéalement bon pour tous.

Dans le couple

Comment est vécue la masturbation solitaire ?

Certaines femmes l’évitent car elles auraient l’impression de tromper leur mari. Les hommes sont plus à l’aise et l’utilisent sans problème. Reste qu’ils peuvent rencontrer la désapprobation de leur compagne s’ils sont surpris dans leur secret ou s’ils pratiquent ouvertement, une hostilité franche de la part de leur partenaire qui se sent flouée.

Dans ce cas là communication devient utile.

couple

Mais dans tous les cas, comment jouir à deux quand on n’a pas pris connaissance de son corps, de son anatomie, de ses zones plus sensibles aux caresses, à la stimulation ? Comment être deux quand on ne s’aime pas ?Quand on refuse d’aller voir avec le miroir, son propre corps dans ce qu’il a d’intime comment accéder à une vraie rencontre intime ?

Sans compter que la masturbation s’accompagne de fantasmes érotiques où tout est permis, où le sujet peut se mettre en scène dans l’imaginaire sexuel.
Cette exploration est fortement constitutive d’une sexualité riche, variée, solo d’abord et duo aussi mais l’un ne va pas sans l’autre. La créativité, l’intérêt, le temps pris pour en profiter, la place dans son planning et dans ses pensées sont indispensables pour vivre une harmonie sexuelle au sens large.

En pratique, dans la consultation de sexologie, la question sur la découverte de la sexualité dans l’enfance comporte l’interrogation sur la découverte de la masturbation. Pratique t-on encore la masturbation étant adulte ?

Les hommes répondent facilement oui, sans trop d’hésitation, avec aisance.
Pour les femmes c’est plus tabou. Certaines sont catégoriques. C’est non, pas de plaisir solitaire. Pourquoi ?
« Parce que j’ai honte' » est la réponse la plus courante. Pour d’autres c’est le silence qui marque une gêne significative et une expression reprobative.
Il n’y a pas d’injonction à la masturbation. Il faut respecter la réserve et la pudeur de chacune.
Il faut avoir envie d’avoir recours à cette voie personnelle pour qu’elle remplisse son rôle.

Contradiction d’époque

A l’heure où la pornographie nous obture par ses diktats de surenchère et d’hyper consommation pseudo normative, dans ces temps où le corps de la femme est morcelé, chosifié, exhibé dans une perspective commerciale, la honte doit changer de camp.

L’éducation sexuelle pratiquement inexistante à l’école de la République, fortement combattue par certaines associations de parents d’élèves (des intervenants ont reçu des menaces) n’avance pas beaucoup et ne comporte pas de données sur le plaisir particulièrement.
Tout est à revoir, cet enseignement existe dans d’autres pays et ont de bonnes répercussions sur les générations.

pénoplastie

Les bienfaits de la masturbation

Ils sont nombreux.

La découverte du plaisir sexuel arrive très tôt… Quelle petite fille n’a pas éprouvé une excitation en descendant sur une rampe ? Quel garçon ne s’est pas intéressé très vite à son pénis ?

La masturbation permet le plaisir, l’orgasme (en 3 minutes pour les filles :8000 récepteurs sur le clitoris bienfaiteur,5000 récepteurs sur le gland du pénis).
Elle favorise l’imagination érotique, la liberté, l’indépendance, la possibilité de plaisir à tout moment (dans l’intimité quand même), c’est un excellent antidépresseur sans effet secondaire !

Elle permet l’établissement de l’amour de soi, renforcé la confiance en soi. On oublie que la sexualité c’est d’abord solo, puis duo ou plus ….au choix de chacune, chacun.
On aurait tort de la considérer comme un pis aller, utilisée quand on est seul, sans partenaire.

C’est au contraire une opportunité à part entière, constitutive d’une sexualité saine, épanouie, joyeuse.
Le recours à la masturbation est une voie résolument moderne, qui avance en positif dans les consciences et les habitudes, dans la lumière.

Combat pas tout à fait gagné cependant : 200 millions de femmes sont excisées dans le monde en 2019. Femmes et hommes doivent encore se battre pour abolir ces mutilations. En France, l’excision est passible des tribunaux.

Vous l’aurez compris la masturbation est notre amie.